Le traditionnel discours à la Nation du Président de la République s’est fait cette année dans un contexte où l’on note de plus en plus une conjoncture mondiale difficile qui ne devrait en aucun cas nous faire dévier, pourgarder le cap dans la mise en œuvre des politiques publiques en réponses aux intangibles besoins de nos concitoyens. Dans la sous-région lacréation de l’Eco constitue une heureuse perspective avec la parité fixe qui est maintenue en attendant le respect des critères de convergence devant faire amener les pays de la CEDEAO vers l’Union monétaire avec éventuellement une parité flexible possible d’être arrimée à un panier de monnaie.
Le discours du Président de la République fait dans ce contexte nous fait retenir les 5 points suivants :
1. La tenue des indicateurs économiques ;
2. Les grandes avancées réalisées ;
3. Les efforts à maintenir et à consolider ;
4. Les défis à relever ;
5. Les Grandes annonces.
1. La tenue des indicateurs économiques
La bonne santé économique d’un pays se révèle, en soi, par la mesure des agrégats macroéconomiques. Kaldor par son carré magique nous enseignait que la tenue des indicateurs macroéconomiques relève de la réussite des politiques publiques à atteindre les quatre grands objectifs de la politique économique conjoncturelle d’un pays que sont : la croissance,le plein emploi des facteurs de production,l’équilibre extérieur de la balance commercialeet la stabilité des prix.De ce point de vue, le pays s’est tourné résolument à respecter les critères de convergence de l’UEMOA. Ce qui fait noter une inflation véritablement maitrisée sur une longue période, un déficit public réduit de 6% à 3% et une croissance soutenue et linéaire de 7%.Cette tendance doit être orientée dans l’utilisation des facteurs de productions financés par un endettement maitrisé et productif mais également à consolider les politiques d’atteinte de l’équilibre de la balance commerciale.
2. Les grandes avancées réalisées
Certaines grandes avancées dans le processus de développement d’un pays n’interviennent que lorsque les projets d’envergure dépassent l’entendement du sens commun avec parfois des coûts d’opportunités qui ne seront dépassés que lorsque ces dits projets sont achevés en répondant aux besoins inouïs des populations. Les trente (30) chantiers en cours dont le BRT devraient entrer dans ce registre.L’énergie étant un plier important dans toute économie, son redressement est un atout dans le sens où elle intervient dans une panoplie d’activités économiques toutes imbriquées.Avec les 1229 MW installées, les 55 MW de l’éolienne à Taiba Ndiaye en plus d’une stratégie de conversion du gaz en électricité entre 2022 et 2023, le Sénégal pourrait être effectivement a l’abris des chocs et du caractère volatil du prix du baril de fuel.Dans le secteur, l’accès au service universel à mon sens est,au-delàdu fait que le développement du pays ne doit laisser aucun sénégalais au bord de la route, une exigence de condition et de dignité humaine. C’est tout heureux que nous notons les 600 milliards de FCFA à injecter pour que les concitoyens aient l’accès universel à l’énergie.
3. Les efforts à consolider
Il me semble que les plus grands efforts à faire pour l’économie de notre pays se trouvent dans l’agriculture. Aujourd’hui, le prix du plancher de l’arachide maintenu à 210 francs, la mise en place du futur Agropole Sud participent sans nul doute à accélérer les performances de l’agriculture devant mener vers l’autosuffisance agricole. Toutefois, la révolution agricole attendue passera par l’amélioration du capital semencier, la mécanisation, l’augmentation des rendements, le développement de la culture hors saison, l’encadrement de la commercialisation,etc.
De manières générale les efforts notamment en matière de développement des infrastructures sur l’ensemble du territoire, de l’accès à l’eau, à l’assainissement,au transport, à l’éducation, à l’employabilité devraient se poursuivre. Les 13 centres de Formations Professionnelles et les 15 autres centres départementaux pour un budget de 300 milliards viennent à point nommé. Le développement de l’économie rurale, avec la Phase 2 du PUDC consacrant des forages et des équipements ruraux divers, est une réponse sans commune mesure à l’exode rural.
4. Les défis existants à relever
Les défis ne manquent pas.Le Sénégal a hérité d’une administration bureaucratique, une administration de paperasse à laquelle il faudrait remédier. Dans tous les pays du monde, l’administration publique s’est muée en administration de développement efficace et efficiente dans la production de biens et services publics.Margaret Thatcher et Ronald Reagan l’ont réussi respectivement en Grande Bretagne et aux États Unis. Le président de la république veutune action publique plus diligente, une administration publique aux services des usagers, une administration de développement. Cela nécessite une refonte des pratiques bureaucratiques. L’innovation et la dématérialisation en seront les sources à l’image du cas du « Service Ontarion » à Toronton (Canada) que j’ai eu personnellement le plaisir à expérimenter.Le projet Smart Sénégal de l’ADIE est un bon début, un bon levier. Tous les défis se situent dans les programmes de dématérialisation des procédures. La mise en œuvre du« Fast Tract » comme méthode de travail y dépend avec à la clé une totale rationalisation des dépenses de l’ État notamment en téléphonie, en électricité, en édifices et en équipements.
5. Les Grandes Annonces :
La salubrité et l’hygiène publiques constituent des défis majeurs pour nos types de pays. Elles devraient être conceptualisées comme des biens publics au regard de leur enjeu de santé publique.« Sénégal Zérodéchet » ; c’est une possibilité ;c’est à notre portée. La lutte contre l’insalubrité et l’occupation illicite de la voie publique, avec l’annonce de la Brigade Spéciale de lutte contre l’encombrement, l’instauration du grand prix de la propreté et la journée mensuelle du nettoiement est un combat à gagner à tout prix. Cette première annonce, lorsqu’elle sera réalisée, sera le socle et le curseur révélateur du changement de mentalité et de la citoyenneté tant souhaitée.
En outre, la littérature économique a révélé que l’équipement en voie ferrée à un niveau optimal engendre une prépondérance de tout pays. Le chemin de fer est le symbole de la révolution industrielle qui a réellement joué un rôle important dans le développement économique des pays occidentaux.Cette deuxième annonce du Président de la République de réhabiliter le chemin de fer Dakar-Bamako me réjouit dans le sens où d’ailleurs j’ai toujours considéré ce secteur primordial au rang des priorités si l’on sait les effets d’entrainements qu’il génère. La troisième annonce concernant le grand projet autoroutier en boucle est à tout point de vue salutaire.
En somme, la généreuse ambition de préparer l’avenir avec « Ligueyeul Euleuk » en tenant comme socle de départ la mise en place du dialogue national gage de dispersion pour l’intérêt national de l’essentiel des contradictions entretenues ou voulues par un aveuglement volontaire et un autisme stratégique d’une certaine classe politique, se distille également dans ce discours de vérité et d’apaisement pour une émergence solidaire et unie. Seulement, je mettrais dans le panier « pour nous libérer par le travail des avatars de la pauvreté et du sous-développement »la prise en compte de l’intelligence économique au service de l’employabilité des jeunes et l’intelligence artificielle au service de la sécurité.
Dr Thierno THIOUNE
Maître de Conférences Titulaire en Economie FASEG/UCAD
Directeur des Etudes du CREFDES
Membre du Comité Scientifique du LARED