Au Cameroun, l’option d’un refinancement de l’eurobond émis en novembre 2015 est désormais en cours d’exécution, avec l’annonce d’un arrangeur désigné. L’opération crée la controverse au sein de l’opinion publique, mais les marchés internationaux affichent un sentiment différent.
La demande des investisseurs internationaux pour les titres d’emprunts internationaux (eurobonds) émis par le Cameroun sur le marché européen des capitaux se porte bien.
Cette nouvelle positive est perceptible depuis la désignation par les autorités de ce pays de Rothschild & Co, comme principal arrangeur en vue d’un refinancement à hauteur de 450 milliards FCFA (816 millions $) qui représentent le montant initial levé en novembre 2015
Selon des indicateurs consultés par l’Agence Ecofin sur des plateformes d’investissement, le titre REPCAM 9,5% 19 nov 2025 (nom de code de l’eurobond camerounais sur les marchés) proposé à 109,3% de sa valeur faciale il y a une dizaine de jours, était sollicité à près de 110,27% de sa valeur ce 12 avril 2021. C’est le signe d’une bonne demande des investisseurs.
On relève aussi une baisse du rendement estimé pour les investisseurs qui font de nouvelles offres, acceptant au besoin de ne gagner que 6,8% de leurs placements, contre un taux d’intérêt de 8,7%, après conversion de la devise de ces titres en euro.
Cette réaction du marché est une bonne nouvelle pour le Cameroun qui pourrait avec cette opération, faire d’une pierre deux coups. Il repousserait les échéances de remboursement de son eurobond qui est prévu entre 2023 et 2025, à raison de 150 milliards FCFA par an. Une somme dont le pays pourrait ne pas facilement disposer en devises, le moment venu.
Le pays pourrait aussi profiter des conditions actuellement favorables du marché international des capitaux pour réduire le service de la dette sur cette obligation. Certes, il va prolonger la période où il paiera des intérêts à ses investisseurs étrangers de l’opération, mais il pourra éviter un défaut de paiement à un coût relativement moindre que celui de l’emprunt initial (9,75%).
Malgré cette dynamique positive des marchés, l’opération fait l’objet de controverses au sein de l’opinion publique. Plusieurs personnes estiment que le gouvernement enfonce le pays dans un endettement profond. L’argumentaire utilisé est celui de la hausse de la dette publique du pays qui a atteint 46,9% du produit intérieur brut (PIB), selon les estimations à fin décembre 2020 de la Caisse autonome d’amortissement du Cameroun (CAA), l’organisme en charge de gérer le stock de la dette.
Mais le refinancement de précédents emprunts est une pratique devenue normale sur le marché international des capitaux. Selon les données de l’Institute of International Finance, d’ici 2030, les besoins de liquidité des pays d’Afrique subsaharienne pour rembourser leurs dettes en devise se chiffrent en centaine de milliards $, et il faudra les trouver.
Le Cameroun souhaite boucler son opération, d’ici fin juin 2021, selon une information rapportée par le média local ecomatin qui cite des documents de la présidence de la République. D’ici là, il n’est pas certain que les choses changeront fondamentalement pour le Cameroun en tant qu’émetteur.
Dans sa dernière notation sur le pays, l’agence américaine de notation Moody’s a d’ailleurs amélioré ses perspectives de « négatives » à « stables ». Enfin, au moins deux pays africains de même niveau ou d’un niveau économique inférieur au Cameroun sont allés sur le marché international, et ont réalisé de bonnes opérations.